Politique de la chaise vide : En RDC, UDPS en détient le record

La politique de la chaise vide ? L’UDPS est coutumier du fait. A l’échelle nationale, le parti tshisekediste en détient même le record. Que de non à ceci et que non à cela ! Que d’invitations déclinées ! Que de rendez-vous politiques majeurs boycottés ! Telles les élections quasi générales de 2006. Premier scrutin pluraliste depuis 1965. Résultat, toute une législature sans élus UDPS ! Y compris dans son fief kasaïen. En 2011, si le premier parti de l’Opposition sous la direction de son leader historique a participé aux élections, c’était pour pratiquer par la suite la politique du « siège vide ». Une fatwa signée par Etienne Tshisekedi Wa Mulumba en personne enjoignait les élus portant la casquette appelée « munyere » à ne pas siéger dans les assemblées et organes délibérants. Conséquence, la formation tshisekediste fait derechef l’impasse sur la deuxième législature. A part ceux des élus UDPS et alliés qui n’ont pas suivi le mot d’ordre du lider maximo. Une longue tradition de boycotts pour quel gain ? Difficile de répondre à cette question. Les connaisseurs des arcanes de l’UDPS savent que ce parti longtemps scotché à l’opposition joue à merveille au « qui perd gagne ». Ayant réussi à assimiler le pouvoir au vice et à ériger l’opposition au rang de vertu cardinale, la formation tshisekediste n’avait pas grand-peine à convaincre sa base de l’inutilité de quitter la rue pour les dorures des palais de la République et autres cabinets douillets nichés à Gombe. Seulement, o tempora, o mores ! L’UDPS post-élections 2018 est un tout autre millésime. Le parti qui a incarné l’opposition au point d’en devenir le synonyme est à la cime du pouvoir d’Etat. Ça change tout. Bien plus que le hardware, c’est le software qui est à renouveler. D’un logiciel contestataire, protestataire voire nihiliste, l’UDPS devrait passer au paradigme gestionnaire. Sous peine de rater sa nécessaire mue d’un parti d’opposition à une formation aux et en responsabilités. Du parti tshisekediste, on attend en effet autre chose que le boycott de… son propre pouvoir ! Si tout au long de la très longue carrière dans l’opposition, la posture nihiliste était politiquement rentable, elle ne l’est plus maintenant qu’UDPS rime avec pouvoir. En 2023, les Congolais ne jugeront pas le parti présidentiel à l’aune de l’art de la politique de la chaise vide ou de sa capacité à battre le pavé, mais en fonction du panier de la ménagère. En politique plus qu’ailleurs, la légitimité d’une cause n’est pas éternelle. Le peuple brûlant facilement ce qu’il a adoré hier. Là où il y a la grandeur, la décadence n’est pas loin. 

POLITIQUE DE LA CHAISE VIDE DECRETREE PAR L’UDPS

L’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), ne désignera personne en remplacement de Jean-Marc Kabund, déchu le 25 mai de son poste de 1er vice-président de l’Assemble nationale. C’est ce qui ressort de la déclaration politique du parti présidentiel signée hier jeudi 28 mai, par son Secrétaire général Augustin Kabuya.

« L’Udps/Tshisekedi considère désormais inopportun de désigner un autre parmi les députés nationaux élus sur sa liste, en remplacement de Jean-Marc Kabund-A-Kabund au poste de 1er vice-président de la chambre basse du Parlement », souligne le parti dans la même déclaration politique, avant de brandir des menaces d’auto-exclusion à tout député Udps qui ne respecterait pas la décision sus-indiquée de la hiérarchie du parti.

Le pave de Mbata 

Dès lors qu’elle décide de ne désigner aucun autre député national pour succéder à Jean-Marc Kabund au perchoir de la Chambre basse du Parlement, l’Udps actionne sa politique de la chaise vide. D’ores et déjà, l’option levée par les gestionnaires du parti au pouvoir au plus haut sommet de l’Etat, suscite des réactions convergentes dans la classe politique. La première est cele du Prof André Mbata qui jette ainsi un véritable pavé dans la marre.

« Le poste de 1er vice-président de l’Assemblée nationale est réservé à l’Udps, pas à un quelconque individu qui se prendrait pour un homme providentiel. Nous devons continuer à enseigner la Constitution, les statuts et le Règlement intérieur de nos partis politiques. La Constitution interdit tout mandat impératif », fait remarquer ce très célèbre constitutionnaliste qui prend ainsi le contre-pied de la position officielle du parti tshisekediste.

André Mbata ne s’arrête pas là. « Les Statuts et le Règlement intérieur de l’Udps n’autorisent pas un  » président ad intérim  » ou un secrétaire général « titulaire » nommé par lui-même (ndlr : le Président ai), en violation des Statuts et du reste inconnu du ministère de l’Intérieur de donner des injonctions, de sanctionner et de décider en lieu et place des députés nationaux », poursuit ce juriste, prof à l’Université de Kinshasa (UNIKIN).

Non aux putschistes, retour aux textes 

Toujours dans sa réaction à l’annonce très officielle de l’UDPS par rapport à la problématique du remplacement de Jean-Marc Kabund, André Mbata se veut formel. « En harmonie avec notre Président de la république, Félix Tshisekedi, les députés nationaux de l’Udps présenteront l’un des leurs pour occuper le poste vacant de 1er vice-président de l’Assemblée nationale », ajoute-t-il encore.

Sur cette question précise, le contradicteur du duo Kabund-Kabuya note que ce ne sont pas de ressources qui manquent au parti de la très symbolique 11ème rue Limete. « Notre parti est une pépinière de cadres compétents de très haut niveau intellectuel soucieux de servir « le Peuple d’abord » au lieu de se servir ou de se cramponner aux postes « , martèle-t-il.

Question. La déclaration politique signée Augustin Kabuya au nom de l’Udps, porte-t-elle des germes de défection au sein du parti ? Assurément pas, selon André Mbata. « Les députés nationaux de l’Udps restent fidèles au parti et au Président de la république. Mais ils ne peuvent en aucun cas obtempérer aux putschistes, notamment après la reconnaissance de la Convention démocratique du parti (CDP) et la confirmation, par le ministère de l’Intérieur, de sa position selon laquelle en attendant le Congrès, seul le Directoire est en droit de diriger et d’engager l’Udps, conformément à l’article 26 de ses Statuts », précise-t-il.

« Il n’y aura pas de dysfonctionnement »

Qu’adviendrait-il au cas où l’Udps s’arc-bouterait sur sa position de ne présenter personne pour remplacer, le désormais ancien 1er vice-président de la Représentation nationale ? Autrement dit, cette option pour la politique de la chaise vide pourrait-elle avoir une incidence fâcheuse sur le bureau ? A priori, des esprits moyens qui se limiteraient aux conjectures, seraient tentés d’y croire.

Cependant, les réactions de deux députés nationaux de haute volée intellectuelle, contactés par Forum des As tard dans la nuit d’hier jeudi 28 mais, convergent. Tous les deux élus soutiennent que l’absence d’un membre du Bureau n’induit nullement le dysfonctionnement de celui-ci. « Même si c’est le président qui est lui-même limogé, le Bureau continuera toujours à fonctionner. Quant à l’intention de l’Udps de saisir les instances judiciaires compétentes pour rétablir Jean-Marc Kabund dans ses droits, laissez-moi vous dire qu’un droit, il y a un principe selon lequel il n’y a pas d’action sans intérêt. S’il veut entreprendre une action auprès du Conseil d’Etat, il peut le faire. C’est son droit le plus simple. Mais une chose est de saisir la Justice. Mais la plus importante est d’avoir raison », conclut l’un des deux élus.

VIOLENCES À MBUJI-MAYI APRES LA DESTITUTION DE KABUND

Comme on le sait, mardi et mercredi dernier, la ville diamantifère de Mbuji-Mayi, capitale de la province du Kasaï Oriental, était à feu et à sang, après la déchéance à Kinshasa, de l’UDPS Jean-Marc Kabund-A-Kabund de son poste de 1er vice-président de l’Assemblée nationale. Mardi, la base de l’UDPS a déferlé sa colère sur le siège du PPRD et aussi d’autres partis politiques du FCC qu’ils ont incendiés après les avoir vandalisés. Mercredi, c’est le summum avec la ville-morte imposée par cette même base qui en a profité pour s’attaquer à coup de pierre à des maisons de commerce ou de toute activité productive, des PME, des marchés et tout engin sur la voie publique.

Le Général commandant de la Police provinciale qui est intervenu personnellement pour arrêter ce débordement préjudiciable à l’économie de la province, annonce des dizaines d’interpellations dans les rangs des partisans de l’UDPS. Aux yeux de certains observateurs, cette colère de la base de l’UDPS de la ville de Mbuji-Mayi, personne ne la comprend. D’autant plus, argumentent-ils, le poste en question de 1er vice-président de l’Assemblée nationale n’est pas attribué à la personne de Jean-Marc Kabund mais bien à l’UDPS qui désignera son successeur. Dans ce cas, rien ne justifie de telles violences dans la ville de Mbuji-Mayi, fief de l’UDPS dès lors que nul n’a retiré ce poste au parti de la 11ème Rue Limete.

Il faut, par ailleurs, noter que le Gouverneur de la province, membre de l’UDPS lui-même, est sorti du bois pour fustiger ce comportement qu’il qualifie de « criminel » de sa propre base. Il condamne tous les actes de violences commis dans la ville et dit que cela ne doit plus se répéter.

Ce qu’il dit en tshiluba à sa base de l’UDPS e la ville de Mbuji-Mayi est significatif. Il leur rappelle que n’est-ce pas leur frère Félix Tshisekedi, Président de l’UDPS, qui est au Pouvoir suprême à Kinshasa d’où il dirige tout le pays. Comment se fait-il alors qu’au même moment, sa propre base se comporte en opposant radical en brûlant tout sur son passage ?

Le gouverneur a fait savoir à la base de la ville de Mbuji-Mayi qu’il ne l’accompagnera jamais dans tels comportements qui font honte à l’UDPS qui est au pouvoir.

Pas si sûr que la base de l’UDPS que ce soit de Mbuji-Mayi ou d’une autre ville de la RDC suive ces mots de sagesse du gouverneur de province du Kasaï Oriental. En effet, cette base semble avoir une autre lecture des événements depuis que Félix-Tshisekedi a signé un Accord avec son adversaire d’hier, Joseph Kabila, sans aucune explication. 

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