Guerre commerciale : Le système de commerce multilatéral fait face à des défis sans précédent

Les dirigeants des Brics réunis en sommet à Johannesburg ont dénoncé jeudi « les défis sans précédent » qui menacent le multilatéralisme, en réponse à la guerre commerciale lancée par les Etats-Unis. Dans une déclaration commune, les présidents de pays (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont fait part de « leur inquiétude concernant les effets des mesures de politique macro-économique prises dans certaines grandes économies avancées ». Ces mesures « peuvent causer une volatilité économique et financière dans les économies émergentes et avoir un impact sur leur perspective de croissance », ont-ils prévenu. « Le système de commerce multilatéral fait face à des défis sans précédent », ont-ils encore relevé, « soulignant l’importance d’une économie mondiale ouverte qui permette à tous les pays et tous les peuples de partager les bénéfices de la mondialisation ».

Les dirigeants des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) réunis en sommet à Johannesburg ont dénoncé jeudi « les défis sans précédent » qui menacent le multilatéralisme, en réponse à la guerre commerciale lancée par les Etats-Unis.

Dans une déclaration commune, les présidents russe Vladimir Poutine, chinois Xi Jinping, sud-africain Cyril Ramaphosa, brésilien Michel Temer et le Premier ministre indien Narendra Modi ont fait part de « leur inquiétude concernant les effets des mesures de politique macro-économique prises dans certaines grandes économies avancées ».

Ces mesures « peuvent causer une volatilité économique et financière dans les économies émergentes et avoir un impact sur leur perspective de croissance », ont-ils prévenu.

« Le système de commerce multilatéral fait face à des défis sans précédent », ont-ils encore relevé, « soulignant l’importance d’une économie mondiale ouverte qui permette à tous les pays et tous les peuples de partager les bénéfices de la mondialisation ».

Les cinq pays émergents ont également demandé « à tous les membres de l’Organisation mondiale du commerce de respecter les règles de l’OMC et d’honorer leurs engagements dans un système de commerce multilatéral ».

Un appel visant directement les Etats-Unis, qui ont déclenché ces derniers mois les hostilités commerciales contre Pékin, Bruxelles et Moscou entre autres.

Le président américain Donald Trump a notamment imposé des taxes douanières sur l’acier et l’aluminium visant surtout la Chine et menace désormais de taxer de façon punitive la totalité des importations chinoises.

En 2017, les Etats-Unis ont accusé un déficit commercial de 376 milliards de dollars (323 milliards d’euros) avec la Chine, qu’ils sont bien décidés de réduire.

« Partenariat »

Dans ce contexte, les présidents chinois et russe ont insisté jeudi sur la nécessité d’améliorer la coopération entre Brics.

Xi a appelé le forum des cinq pays émergents, lancé en 2009 et qui représente 40% de la population mondiale, à « déverrouiller le potentiel énorme de (leur) coopération économique ».

« Il est nécessaire que les Brics renforcent leur partenariat stratégique » pour faire « de la prochaine décennie une autre décennie en or », a-t-il estimé.

Son homologue russe l’a suivi, estimant que les Brics jouaient « un rôle unique dans l’économie mondiale ».

« Ils contribuent à hauteur de 42% au PIB mondial et cette part ne cesse de croître », s’est félicité Vladimir Poutine.

« En 2017, le commerce entre les Brics a augmenté de 30% et nous comptons développer encore plus ce partenariat », a-t-il assuré, un pin’s des Brics épinglé à son costume.

En marge du sommet, le président russe s’est entretenu jeudi avec son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, invité à Johannesburg comme d’autres pays non membres des Brics.

« Nos relations bilatérales s’améliorent sans aucun doute », a déclaré, selon le Kremlin, M. Poutine saluant la coopération entre les deux pays dans la crise syrienne et dans le domaine économique.

« Les relations bilatérales se développent rapidement », a confirmé le président turc, cité aussi par le Kremlin qui n’a pas donné plus de détails sur la teneur des discussions.

Depuis le début de la crise syrienne en 2011, la Turquie soutient les rebelles qui cherchent à renverser le président Bachar al-Assad, que la Russie et l’Iran appuient militairement.

En dépit de leurs positions opposées, Ankara et Moscou coopèrent étroitement sur le dossier syrien depuis l’an dernier.

Outre la Turquie, de nombreux pays africains soucieux de développer des relations avec les Brics ont été conviés à participer au sommet de Johannesburg, qui se conclut vendredi.

Le chef de l’Etat zimbabwéen Emmerson Mnangagwa, candidat à la présidentielle de lundi dans son pays, a ainsi interrompu brièvement sa campagne électorale pour se rendre dans la capitale économique sud-africaine, a rapporté jeudi le groupe audiovisuel public zimbabwéen ZBC.

TRUMP ACCEPTE UNE TRÊVE AVEC L’UNION EUROPÉENNE ?

Donald Trump semble avoir entendu les mises en garde contre sa politique commerciale agressive en acceptant une trêve avec l’Union européenne, qui suscite néanmoins des interrogations et doit encore se concrétiser par un véritable accord.

« Nous avons eu une longue session de négociation hier. Nous avons défini les contours d’un accord et, désormais, nous allons les transformer en un véritable accord », a déclaré le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, sur la chaîne américaine CNBC, au lendemain d’une réunion entre le président américain et le chef de l’exécutif européen, Jean-Claude Juncker.

« Le contexte ne permet pas » une telle négociation, a rétorqué le président français Emmanuel Macron, depuis Madrid, soulignant qu’il attendait « des signaux de désescalade sur l’acier et l’aluminium auxquels des taxes illégales ont été appliquées par les Etats-Unis », comme « préalable à toute avancée concrète ».

Washington et Bruxelles ont désamorcé mercredi la crise née des tarifs douaniers imposés par les Etats-Unis, annonçant leur volonté de supprimer la quasi totalité des tarifs douaniers et une série de décisions dans l’agriculture, l’industrie et l’énergie. Ces mesures doivent toutefois être formalisées.

Alors que l’Union européenne est, depuis le 1er juin, sous le coup de taxes douanières punitives américaines de 25% sur l’acier et de 10% sur l’aluminium, Steven Mnuchin a reconnu que « le premier dossier » à régler était précisément celui concernant les taxes sur l’acier et l’aluminium et les représailles européennes qui ont suivi.

Il n’a toutefois pas élaboré la manière dont les deux parties allaient s’y prendre.

Il a également confirmé qu’il n’y aurait pas de taxes douanières sur le secteur automobile européen pendant les négociations.

La Maison Blanche avait chargé, fin mai, son ministre du Commerce Wilbur Ross de déterminer l’opportunité d’imposer des taxes supplémentaires allant jusqu’à 25% sur l’automobile. Et « l’enquête est toujours en cours » pour les imposer aux pays hors UE, a indiqué Wilbur Ross.

Interrogé sur le calendrier des négociations avec l’UE, M. Ross a déclaré qu’il était « difficile de se prononcer ». « Les discussions sur le commerce durent en général des mois », ou une année, a-t-il observé devant des journalistes. « Nous allons nous efforcer de les accélérer », a-t-il ajouté.

Le compromis annoncé mercredi est intervenu alors que de plus en plus d’entreprises américaines, à l’instar du fabricant d’électroménagers Whirlpool ou le premier constructeur automobile General Motors, ont enregistré des centaines de millions de dollars de coûts supplémentaires dans leurs comptes du deuxième trimestre en raison de la guerre commerciale.

Mardi, l’administration Trump a aussi dû consentir à une aide d’urgence de 12 milliards pour compenser les pertes de revenus des agriculteurs.

Jeudi, Donald Trump se rendait d’ailleurs dans l’Iowa, l’Illinois et le Missouri à la rencontre d’agriculteurs et d’industriels.

« Nous avons ouvert le marché pour vous, agriculteurs », a-t-il déclaré.

La trêve annoncée mercredi suscite pourtant des réactions contrastées.

L’Allemagne, dont les excédents commerciaux records et l’industrie automobile sont dans le collimateur de la politique protectionniste du président américain, a jugé « constructif » le résultat de la rencontre Trump-Juncker.

Soulagement et scepticisme

« Non seulement la menace des tarifs douaniers automobiles est écartée mais encore nous nous sommes mis d’accord pour travailler ensemble contre les pratiques commerciales injustes et pour une réforme de l’OMC », Organisation mondiale du Commerce, a en outre réagi le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas.

En revanche, Paris a demandé des « clarifications », par la voix de son ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, dans un entretien à l’AFP. « Une bonne discussion commerciale ne peut se faire que sur des bases claires », a-t-il mis en garde.

Pas question, a-t-il rappelé, d’un accord commercial global USA-UE, comme l’avait évoqué Steven Mnuchin le week-end dernier à la réunion du G20 Finances au Brésil.

« Nous ne voulons pas entrer sur la négociation d’un grand accord dont nous avons vu les limites avec le TTIP », traité dont les discussions entre Bruxelles et l’administration de Barack Obama avaient échoué il y a deux ans, a prévenu le ministre français.

Alors que Donald Trump a annoncé que l’Union européenne allait importer « beaucoup de soja » américain, dont 94% de la production est génétiquement modifiée, Bruno Le Maire exige aussi que l’agriculture « reste en dehors du champ des discussions ».

« Nous avons des normes sanitaires, alimentaires et environnementales élevées et des règles de production auxquelles nous sommes attachés parce qu’elles garantissent la protection et la sécurité de nos consommateurs », a-t-il insisté.

Le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, a, lui, salué cette avancée tout en soulignant qu’il était « trop tôt » pour juger des résultats.

UE – ETATS-UNIS : AUCUN ACCORD N’A ÉTÉ CONCLU

L’UE a obtenu d’ »excellents résultats » mercredi à la Maison Blanche, notamment la non application de taxes américaines sur les automobiles européennes, mais il faut se garder de tout triomphalisme car aucun accord n’a été conclu, a détaillé jeudi à Bruxelles un haut responsable européen.

« Nous ne sommes pas encore au niveau d’un accord, pour lequel il faudra des directives de négociations de la part du conseil des Etats (soit le conseil de l’UE) », a déclaré à des journalistes ce haut responsable sous couvert de l’anonymat.

« Mais l’UE a obtenu d’excellents résultats sans mettre en péril ses intérêts essentiels, ni aucune de ses valeurs ni aucune de ses législations », a-t-il assuré, au lendemain de l’accord commercial USA-UE annoncé par Donald Trump et Jean-Claude Juncker.

« Le président Donald Trump voulait un accord, car il y a une pression énorme aux Etats-Unis contre la guerre commerciale. Mais il faut se garder de tout triomphalisme. Rien n’est gravé dans le marbre », a averti le responsable européen.

« La déclaration commune (…) permet d’éloigner, voire d’éliminer, le péril d’une guerre commerciale majeure entraînée par des tarifs supplémentaires sur les voitures européennes au nom de la sécurité nationale des Etats-Unis », a-t-il expliqué.

Un groupe de travail de haut niveau va être constitué « dans les prochains jours » avec des conseillers du président américain et du chef de l’exécutif européen pour discuter des possibilités de réduire les tarifs douaniers sur les biens industriels entre l’UE et les Etats-Unis.

Il a été chargé de remettre un rapport dans 120 jours, donc fin novembre, soit après les importantes élections de mi-mandat qui auront lieu le 6 novembre aux Etats-Unis.

« Tant que les parties négocient, les droits de douane américains sur les automobiles ne seront pas appliqués », a souligné le responsable européen.

Les deux parties ont en outre « la volonté de trouver une solution conjointe pour les droits de douane américains sur l’acier et l’aluminium et pour les contremesures européennes qui commencent à avoir des effets », a-t-il ajouté.

Mais ces négociations ne seront pas une résurrection de l’impopulaire pacte de libre-échange TTIP (ou TAFTA), aujourd’hui gelé, avec un seul accord global, mais plutôt des accords ad hoc, a précisé la même source.

Soja, gaz

L’accord annoncé mercredi prévoit une augmentation des achats européens de soja et de gaz naturel liquéfié (GNL) américain. « Il s’agit d’une déclaration d’intention, pas d’engagement de la part de l’UE », selon le responsable.

« L’Union européenne n’est pas une économie soviétique. Elle ne peut pas imposer des achats à des acteurs privés. Ces importations se feront aux conditions du marché », a-t-il insisté.

L’UE importe chaque année 30 millions de tonnes de fèves et de graines de soja et ses trois principaux fournisseurs sont le Brésil (14 millions de tonnes), l’Argentine (8,4 MT) et les Etats-Unis (5 MT).

L’Union ne va pas importer plus de soja, mais aux conditions du marché. Or les prix du soja américain ont baissé de près de 15%. « L’UE pourrait donc être en mesure d’importer plus de soja américain », a expliqué le responsable.

Ces conditions sont également applicables pour le GNL américain s’il devient compétitif.

Mais pour cela, il faut également lever les obstacles administratifs américains que constituent les licences d’exportations délivrées par le département de l’Energie, arguent les dirigeants bruxellois.

« Ces certificats d’exportation ne sont pas délivrés automatiquement et donc les acheteurs n’ont aucune garantie que les livraisons américaines ne seront pas interrompues », a observé le haut responsable.

Les Etats-Unis ont exporté 17,2 milliards de m3 de gaz en 2017 dont 2,2 milliards de m3 de GNL par méthaniers vers les terminaux de l’UE. Or « la capacité totale d’importation de gaz naturel de l’Europe va augmenter de 20% d’ici à 2020 », selon le centre d’études IHS Markit.

(Afp)

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